– Ça ne peut pas continuer ainsi Kelen ! Tu n’as pas le droit de profiter de ce pauvre Daniel.

Imogen est folle de rage dans un français parfait. Alessandro regarde son amie avec étonnement. Décidément, quelle italienne elle aurait fait ! Et maternelle comme tout avec ça. Il n’y a qu’à voir comme elle protège son ami étrange du « squattage » intempestif de la petite française qu’ils ont en face. Une petite parisienne sexy qui s’est incrustée chez ce malheureux Daniel, un « nerd » bizarre, sous prétexte de faire du Couchsurfing.

Voilà quelques jours que Daniel a téléphoné à son amie Imogen, alors en pleine soirée romantique, pour se plaindre de cette artiste égotiste et bruyante, qui fait la fête tous les soirs et le force à acheter organic, sans qu’il ait rien le droit d’en redire. Cela fait deux mois que ça dure apparemment.

– Et Daniel qui s’en plaint seulement maintenant ! Comment oses-tu profiter de cet homme malade ? Il ne supporte pas le bruit, tu sais. T’avoir chez lui est une torture.

– Et toi ? Tu es sa mère pour me dire ça sans doute ? Tu n’as pas déjà un chéri dont il faut t’occuper ?

Kelen a la gouaille des parisiennes : un vrai cliché de petite artiste française, pleine d’insolence et de « pep ». Elle regarde à peine son interlocutrice, car elle est occupée à écrire quelque chose derrière son écran d’ordinateur. On se croirait dans un Truffaut moderne. Cette dispute entre sa bien aimée et une petite parisienne sexy a un je-ne-sais-quoi d’excitant pour Alessandro.

– Daniel est mon ami. Et il se plaint que tu fais trop de bruit et que tu le forces à acheter tout « organic », déclame Imogen en rougissant de colère.
– Il dit aussi que Kelen est une entertainer de génie, intervient Alessandro avec une ébauche de sourire au coin des lèvres.

Kelen se tourne vers l’italien avec un sourire radieux et dit :

– Merci. On se comprend entre artistes.

Imogen gifle son ami du regard. Kelen ré-attaque :

– Daniel reste avec moi à toutes les fêtes. Il a de la chance. Avec moi il rencontre tous les artistes du coin. Il a besoin d’un peu de vie ici. Il a besoin d’une artiste comme moi. C’est « vous » qui le faites passer pour un « weirdo » a vouloir le faire vivre dans le silence, à ne voir personne. Il lui faut la vraie vie : la « joie de vivre » (ndlr : dit en français). I love Daniel, I really do. Mais tu ne peux pas comprendre ça « vieille fille ». J’aide Daniel. Ça le change de ses « geeks » d’amis…

Kelen est toute fière. Elle sort cette dernière remarque en anglais avec un accent français à couper au couteau qui fait glousser Alessandro de bonheur malgré lui.

– Quelle égoïste, trépigne Imogen humiliée. Et regarde-moi au moins quand je te parle…

Imogen s’approche de Kelen qui n’a pas le temps de masquer l’écran avant que la jeune anglaise ne s’approche.

– Mais qu’est-ce que c’est !? La Parisienne va sur des sites de dating pendant que je lui parle !

Imogen se jette sur l’écran en dépit du geste de rejet de Kelen.

– Et elle écrit des sex messages en plus : I want your cock ! Laisse la main d’artiste s’occuper de toi. De la part de « French_artiste_loveuse ». Je rêve !

– Un anglaise prude. Une vraie protestante…, ricane Kelen en imitant cette fois l’accent des buveurs de thé. Et je suis Bretonne, pas Parisienne. Es-tu vieille fille au point de ne jamais avoir au moins un peu « sexté » ? Pauvre Imogen…

– Mais qu’est-ce que c’est que ce site ? avance Alessandro curieux.

Kelen sourit avec indulgence.

– C’est « sex conversation exchange » ou « sexchange » pour les habitués ! Un site de « sexchat » international où on fait l’amour en ligne dans toutes les langues : on apprend à manier la langue dans tous les sens, on fait d’une pierre deux coups. C’est du « baise-moi international », du « in bed global »… !

Alessandro est tout excité.

– Trouve-toi un logement, s’écrie Imogen. Sinon, je fais savoir à tout le voisinage qu’il y a une pauvre fille qui profite d’un handicapé ici. Et ça ne fera pas joli dans un petit coin tranquille comme Greenwich village…

Kelen lui jette un regard noir.

– « Pisse-vinaigre »…, chuchote t-elle avant de se retourner définitivement vers son écran d’ordinateur.

Daniel, un petit homme à lunettes, ayant fini de passer son coup de téléphone, descend alors du premier étage.

– Hullo, dit-il avec l’air impassible des innocents qui n’ont rien entendu.

– On allait partir Daniel, dit Imogen avec une voix douce qu’elle n’avait pas deux secondes avant et en poussant Alessandro vers la porte. Oui, oui. On voulait juste faire connaissance avec ta nouvelle « lodger », ajoute t-elle en adressant un clin d’oeil à Kelen qui lui tire la langue.

Les deux jeunes amants sortent de la petite maison du « village » et se dirigent vers la Tamise :

– Oh ‘Sandro, allons au Trafalgar Tavern ! Cette peste m’a mise hors de moi. Et toi tu n’as pas beaucoup aidé d’ailleurs.

– C’est que tu parles assez fort pour deux amore, dit Alessandro l’air benoit.

– Avoue-le. La Bretonne t’excite, dit Imogen soupçonneuse. Pour un peu, tu l’aurais soutenue.

– Les Français et les Italiens sont les meilleurs d’Europe au lit parait-il : Birds of feather flock together. 

Le jeune italien se prend un sérieux coup dans l’estomac.

– Tu n’auras qu’un moyen de te faire pardonner pour cette remarque déplacée une fois au Trafalgar Tavern.

– Qu’est-ce que c’est ? demande Alessandro en haussant les sourcils.

Imogen glousse.

– La Bretonne « sextait » par ordinateur quand je lui parlait. Elle m’a donné une idée. Oh, Alessandro, on a fait du « sex art ». Maintenant, on va faire du « cyber art » : en honneur à moi !

– Hm, hm ? dit Alessandro intrigué.

Le couple arrive au Trafalgar Tavern. Le soleil couchant scintille sur les eaux de la Tamise. Le couple parvient à dénicher une table près de la baie vitrée qui laisse entrevoir la surface miroitante du fleuve. Le pub est tout sombre. Suffisamment sombre pour s’y sentir en intimité.

– Sors ton téléphone ‘Sandro. On va faire l’amour en public ! Et ça va barder pour toi !

Imogen jubile.

Imogen jette un oeil malicieux en relevant le visage vers son amant.

– Alors ? Tu le veux vraiment ?

– Vas-y amore…

– Alors il faut me supplier.

– Amore…

– Dis-le tout bas.

Alessandro regarde en tous sens. Il rougit, puis il chuchote à l’oreille d’Imogen :

– Je te supplie de bien vouloir continuer à me sucer. Je ferai tout ce que tu voudras amore. Tout !

Imogen frappe dans ses mains de satisfaction.

– Imogen, tu es déjà trempée…

La main d’Alessandro s’est glissée furtivement sous la table, jusqu’à frotter la culotte satinée de sa compagne.

– Oh m… , ‘Sandro… Il va falloir aller aux toilettes tout de suite. Je n’ai même pas eu le temps d’en profiter. Je suis trop excitée !

Les deux amants se ruent vers les toilettes.

– Ouf… Ce n’est pas trop sale ici. Et heureusement, il y a de vraies portes.

– Je peux te prendre malgré tout comme tu veux ?

– Lèche-moi d’abord. Je ne peux plus attendre.

Alessandro s’agenouille et relève les jupe d’Imogen et enfonce sa langue en elle avec douceur.

– Oh ‘Sandro, tu fais toujours ça comme il faut…

Imogen ne tarde pas à fondre de plaisir.

– Prends-moi maintenant.

Alessandro la soulève légèrement et la pénètre encore toute frémissante de volupté.

– Pas si mal le « cyber sex ». La prochaine fois, mon tour alors !

 

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